Guerres de Vendée

Thouars et les guerres de Vendée en 1793

5 mai 1793, l’armée vendéenne s’empare de Thouars

A Thouars, les forces républicaines, commandées par le général Quétineau, alignent 3 500 hommes. Les effectifs sont répartis de la façon suivante : 2 650 gardes nationaux divisés en cinq bataillons, 325 hommes du 8e bataillon de volontaires du Var, dit des Marseillais, 113 cavaliers divisés en cinq détachements et 62 canonniers des gardes nationales de Poitiers et Saint-Jean-d’Angély. Des volontaires de bataillons des Deux-Sèvres, de la Charente, de la Nièvre et de la Vienne sont également présents. (1) Les républicains disposent aussi de douze canons.

Les Vendéens sont quant à eux forts de 20 000 à 27 000 hommes. Entre un tiers et la moitié d’entre-eux sont armés de fusils. La cavalerie compte 750 hommes et l’artillerie dispose de six canons. Les insurgés sont menés par Jacques Cathelineau, Maurice d’Elbée et Jean-Nicolas Stofflet, Guy Joseph de Donnissan et Gaspard de Bernard de Marigny, Charles de Bonchamps et Jean-Louis de Dommaigné, Henri de La Rochejaquelein et Louis de Lescure. (2)

Sont présents aux côtés d’Henri de La Rochejaquelein, ceux de Saint Aubin de Baubigné, les Cochard, mais aussi, ceux de Coron, Michel-Victor Chabosseau et ses beaux-frères. Venant de Bressuire, René-Pierre Gellé et ceux de Pierrefitte se portent au pont de Saint Jean sous les remparts du Château. Les combattants vendéens des quatre familles sont tous à Thouars ensemble, sans se connaître et sans imaginer qu’un jour leurs descendants formeront une seule famille.

5 mai 1793 Les Vendéens attaquent Thouars (3)

Le matin du 5 mai, les Vendéens arrivent devant Thouars au niveau du village de Ligron, dans la commune de Sainte-Radegonde, en chantant le Vexilla Regis. Les deux armées sont séparées par un cours d’eau : le Thouet. Les Vendéens sont à l’ouest de la rivière et les républicains à l’est. Le passage est praticable sur trois points : au nord, au Gué-au-Riche, près du village de Pompois, à quatre kilomètres de la ville de Thouars ; au centre sur le pont de Vrines, près du village de Vrines ; et au sud, au pied des vieilles murailles de ville de Thouars, au bac de Saint-Jacques et au pont de Saint-Jean qui deviendra le « pont aux Chouans ».
La bataille s’engage à cinq heures du matin. Bonchamps attaque au Gué-au-Riche, La Rochejaquelein et Lescure au pont de Vrines, d’Elbée, Stofflet et Cathelineau au bac Saint-Jacques et Marigny et Donnissan au pont Saint-Jean.

Quétineau fait déployer 1 000 hommes du bataillon des Marseillais et du bataillon de la Nièvre avec trois canons sur les coteaux pour défendre le pont de Vrines, tandis 300 hommes constitués de volontaires de la Vienne, de gardes nationaux d’Airvault et de gardes nationaux à cheval commandés par Delivenne prennent position au Gué-au-Riche. La ville de Thouars est quant à elle située sur un haut promontoire et est protégée par de vieilles murailles en assez bon état de conservation. (4)

Les affrontements s’intensifient à partir de huit heures du matin et restent longtemps indécis sur tous les points. À Vrines, les républicains ont laissé le pont partiellement coupé et barré par une charrette de fumier renversée. Sur ce point, les chefs vendéens peinent à entraîner leurs hommes et la fusillade est si vive que La Rochejaquelein doit s’absenter un temps pour aller chercher des munitions. Par deux fois, Lescure se présente seul sur le pont, sous le feu des républicains, pour tenter d’entraîner ses hommes, mais sans succès. Finalement, à trois heures de l’après-midi, La Rochejaquelein, Lescure, un chef nommé Forest et un paysan franchissent seuls le pont. La masse des Vendéens s’élance alors et passe sur la rive droite. Pendant ce temps, au Gué-au-Riche, Bonchamps et Dommaigné, à la tête de la cavalerie, parviennent à venir à bout des volontaires de la Vienne et des gardes nationaux d’Airvault. Ils repoussent également la cavalerie républicaine qui fuit et prennent à revers les troupes au pont de Vrines, achevant de les mettre en fuite. Quétineau ordonne la retraite sous les murs de la ville. (5)

Les Vendéens marquent ensuite une pause pour faire traverser le gros de leurs troupes et leurs canons. Les patriotes reprennent un temps courage et se mettent en bataille au nord de la ville, confiants dans la nature du terrain. Mais les tirs des canons vendéens les font fléchir et ils se replient à nouveau derrière les murs de la ville.

Les Vendéens se ruent ensuite sur les remparts au niveau de la rue de Paris et tentent des créer des brèches sur les points les plus faibles des murs, aux moyens de piques et de pioches. La Rochejaquelein se hisse lui-même sur les épaules d’un combattant nommé Toussaint Texier, agrandit de ses mains une brèche de la muraille, depuis laquelle il fait ensuite feu sur les patriotes. Les insurgés parviennent finalement à enfoncer la porte et entrent dans la ville.

Les Vendéens au pied des fortifications (6)

Pendant ce temps, au pont de Saint-Jean, les canons commandés par Gaspard de Bernard de Marigny, ancien officier d’artillerie, finissent également par abattre la porte Maillot. Les forces de d’Elbée, Stofflet, Cathelineau et Donnissan s’engouffrent alors dans la ville par le sud. Les différentes colonnes font leur jonction dans le quartier Saint-Laon. (7)

Les Vendéens traversent le Pont neuf (aujourd’hui renommé Pont des Chouans) (8)

Le général Quétineau fait hisser le drapeau blanc et les combats s’achèvent entre 17 et 19 heures. Le juge de paix Redon de Puy Jourdain est chargé de la capitulation auprès de Maurice d’Elbée.

À l’exception de quelques volontaires marseillais qui s’enfuient à la nage, la petite armée de Quétineau est presque intégralement faite prisonnière. Les républicains laissent entre 500 et 600 morts et 3 000 prisonniers.
Le butin est également important. Les Vendéens capturent douze canons et s’emparent de plusieurs milliers de fusils et de munitions. Ils saisissent un trésor de 500 000 livres constitué d’objets d’or et d’argent dérobés dans les églises et d’une presse aux assignats.
Les prisonniers sont enfermés dans la cour du château, où ils demeurent 24 heures sans manger et presque sans boire, et sont dépouillés de leurs uniformes, qui sont brûlés. Ils sont finalement relâchés le 7 mai en échange du serment de ne plus porter les armes contre la Vendée.
Mis à part quelques insultes de la part de Stofflet, le général Quétineau est traité très courtoisement par les chefs vendéens. Il dîne avec eux au château et partage la chambre de Bonchamps dans l’hôtel Brossier de la Charpagne, son ancien quartier-général devenu celui de l’armée vendéenne. Il refuse les offres faites par les chefs royalistes de rejoindre l’armée vendéenne ou de demeurer comme prisonnier sur parole. Le 8 mai, il obtient un passeport qui lui permet de quitter Thouars et il se présente à Doué au général Leigonyer qui le fait mettre aux arrêts.

14 septembre 1793, la tentative de l’armée vendéenne pour reprendre Thouars, se solde par un échec

Le 14 septembre 1793, le général vendéen Louis de Lescure rassemble 2 000 hommes, pour la plupart, paysans des Mauges dont des membres de la famille Cochard pour empêcher la levée en masse dont les recrues devaient être rassemblées à Thouars.

En raison du faible nombre de gardes nationaux en poste, il aurait pu s’emparer de la ville mais ses hommes refusèrent d’attaquer de nuit. Le lendemain, au point du jour, il s’empare du pont de Vrines puis entre dans les faubourgs. Mais les gardes présents sur place ont été rejoints par les troupes républicaines, au nombre d’environ 20 000 hommes, commandés par le général Gabriel-Venance Rey basées à Airvault. En infériorité, l’armée vendéenne doit battre en retraite. Lescure rappelle ses soldats occupés et se retire en bon ordre. (9)

Les pertes vendéennes furent de 20 morts, les pertes des Républicains de 6 morts et 15 blessés.

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(1) SAVARY Jean-Julien, Guerre des Vendéens et des Chouans, Tome 1, 1824
(2) GABORY Émile, Les Guerres de Vendée, Robert Laffont, 1912-1931réimpression 2009

(3) ROUSSEL Philippe, La croisade vendéenne (1793-1796), Thouars, 5 mai 1793, 1960, p 47
(4) AMIGLIO Daniel-Jean, Thouars et les armées vendéennes, cité dans « Histoire militaire des guerres de Vendée », COUTAU-BEGARIE Hervé et DORE-GRASLIN Charles (direction), Economica, 2010

(5) AMIGLIO Daniel-Jean, Thouars et les armées vendéennes, cité dans « Histoire militaire des guerres de Vendée », COUTAU-BEGARIE Hervé et DORE-GRASLIN Charles (direction), Economica, 2010
(6) Prise ​​de Thouars par les Vendéens en 1793, Lithographie, Anonyme, XIXe siècle
(7) SAVARY Jean-Julien, Guerre des Vendéens et des Chouans, Tome 1, 1824
(8) DRAKE Thomas, (1818-1895), Vue de Thouars, le Pont des Chouans, entre 1856 et 1860, BNF
(9) BLANCHARD Pierre, Histoire des batailles, sièges et combats des Français, depuis 1792 jusqu’en 1815, Imprimerie Imbert, 1818

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René-Pierre Gellé, charron à Pierrefitte (Deux-Sèvres), lors des guerres de Vendée

René-Pierre Gellé est le 3ème fils de Joseph Gellé et de sa deuxième femme Marie Civrais, il est né le 28 juin 1759.
Le 15 novembre 1791, il se marie avec Marie Magdeleine Baudry. Il est alors âgé de 32 ans.
Le couple va donner naissance à 8 enfants entre 1792 et 1814.

René-Pierre exerce le métier de charron à Pierrefitte, berceau de la famille Gellé.
Il met son savoir-faire au service de l’armée royale d’Anjou et du Haut Poitou, en fabricant charrettes et carrioles pour transporter armes et vivres et participe aussi à certains combats.

Destruction et reconstruction de sa maison

La maison de René-Pierre Gellé est partiellement détruite, vraisemblablement lors des incursions des colonnes infernales en 1794.
Le document ci-dessous a été établi en 1808 et 1811. Il fait état des destructions et endommagements faits aux constructions lors des guerres de Vendée à Pierrefitte.
Sont listés : la valeur avant et après la reconstruction, si la maison a été reconstruite et le coût de reconstruction si la maison est toujours en ruine.
La maison de René-Pierre Gellé a été reconstruite en 1803, sa valeur a été estimée à 300 francs avant la destruction et à 600 francs après sa reconstruction.

Archives Départementales des Deux-Sèvres, Dossiers vendéens, destructions

Blessure

Il sera blessé par deux coups de sabre et d’un coup de bayonnette (baïonnette) comme nous l’apprends, la demande de secours de 1824 reproduite ci-dessous.
Dans quelle circonstance a-t-il été blessé ? Lors d’un combat ? Lors de la destruction de sa maison ?
La demande de secours indique : « Manque le certificat d’indigent ».
René Pierre était il indigent en 1824 ? ou est ce que, pour percevoir un secours, il fallait être reconnu indigent ?

Archives Départementales des Deux-Sèvres | 1815 – 1827 | AD79 R69-12, Archives militaires – Secours aux anciens soldats vendéens. Dossiers individuels (Parthenay – Rorthais)

Pourtant, à chaque naissance de ses enfants de 1792 à 1814, René-Pierre est identifié comme charron habitant la commune de Pierrefitte.
En 1824, il a 65 ans et n’est peut-être plus apte à travailler comme charron, travail au combien physique…

Il meurt, 12 ans plus tard, le 25 août 1836, à l’âge de 77 ans.

Le métier de charron

En hiver, le charron s’occupait de rentrer son bois et dès les beaux jours, les commandes affluaient, pour préparer le matériel utile aux moissons, construire ou réparer charrettes, tombereaux et carrioles. Il travaillait avec le forgeron en voiture pour le cerclage et le ferrage des roues. Des commandes lui étaient, aussi, passées pour des échelles, mangeoires, râteliers, brouettes, crèches et tonneaux.
Le charron pouvait être aussi appelé « embatteur de roues », « rodier » ou « royer ».

Au cœur du métier de charron était sa maîtrise de la roue, sa taille dépendant du type de véhicule sur lequel elle serait fixée. Le charron fabriquait les roues en construisant d’abord le moyeu (appelé la nef), les rayons et la jante en les assemblant à partir du centre de la roue vers l’extérieur. Le cerclage était réalisé par forge et cintrage. Cette opération consistait généralement à enfermer la roue dans un bandage en fer, placé à chaud au rouge sur le bois de la périphérie circulaire. Le fer se contractait alors en se refroidissant à température ambiante, le rétrécissement assurant le serrage de toutes les pièces assemblées. La roue devait être suffisamment solide pour supporter une lourde charge, mais surtout, être capable de résister aux surfaces inégales et rugueuses.

Un tour de charron

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La réponse des révolutionnaires aux Vendéens : dépopulation ou génocide ?

Lors des guerres de Vendée, comme dans l’ensemble du territoire dit de la Vendée militaire, les villages de mes ancêtres : Coron, Les Cerqueux, (Maine -et Loire) Saint Aubin de Baubigné, Combrand et Pierrefitte (Deux-Sèvres) ont été quasi-intégralement ou partiellement détruits et les habitants ont fui leurs maisons. Dans un ouvrage collectif, dirigé par l’historien Jacques Hussenet un relevé exhaustif du nombre d’habitants des 735 communes du territoire en 1791, 1800, 1806 et 1820 a été réalisé. (2). La carte ci-dessous illustre la perte d’habitants plus ou moins forte selon les communes entre 1791 et 1800.

Source des données : Détruisez la Vendée, ouvrage collectif sous la direction de Jacques Hussenet, Edition du Centre vendéen de recherches historiques, 2007, pages 583 à 621

La situation spécifique de chacun des villages :

Les réactions des révolutionnaires face aux soulèvements vendéens

Barère en juillet 1793 propose un plan de destruction totale : « L’inexplicable Vendée existe encore… Elle menace de devenir un volcan dangereux… Vingt fois les représentants, les généraux, le Comité lui-même nous ont annoncé la destruction prochaine de ces fanatiques… La Vendée est l’espoir des ennemis du dehors et le point de ralliement de ceux de l’intérieur… Détruisez la Vendée ! » (1)

Dès son arrivée en Vendée, au lendemain de Savenay, Turreau écrit au Comité de Salut Public : « Je vous demande une autorisation expresse ou un décret pour brûler toutes les villes, villages et hameaux de Vendée qui ne sont pas dans le sens de la Révolution et qui fournissent sans cesse de nouveaux aliments au fanatisme et à la royauté. » (2)

Face à la révolte des Vendéens, au nom de l’unité nationale, la répression devait être à la mesure du danger encouru par le régime issu de la Révolution comme Robespierre l’exprima au Comité de Salut Public : « Il faut étouffer les ennemis intérieurs de la République ou périr avec elle ; or, dans cette situation la première maxime de votre politique doit être qu’on conduit le peuple par la raison et les ennemis du peuple par la terreur… Cette terreur n’est autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible. » (3)

Les destructions et massacres s’inscrivent dans cette logique incontestée. Dès le 1er octobre 1793 la Convention le proclame à l’armée de l’Ouest : « Soldats de la liberté, il faut que les brigands de la Vendée soient exterminés ; le salut de la patrie l’exige, l’impatience du peuple français le commande, son courage doit l’accomplir… » (4)

Dès lors la mission exterminatrice passe avant les opérations militaires : « dépeupler la Vendée » dira Francastel en janvier 1794 ; « purger entièrement le sol de la liberté de cette race maudite » dira le général Beaufort au même moment.

Femmes et enfants sont condamnés avec circonstances aggravantes : les premières en tant que sillon reproducteur, « sont toutes des monstres », « les seconds sont aussi dangereux car brigands ou en passe de le devenir » dira Carrier (5)

Dépopulation ou génocide

Système de dépopulation dira Gracchus Babeuf en 1795 (6), génocide dira Reynald Sécher en 1986, volonté de punir la Vendée de la part de la Convention pour s’être opposé à la Révolution, sans aucun doute.

Combien de morts?

La deuxième question qui fait débat entre les historiens spécialistes des guerres de Vendée est le nombre de morts. Un consensus se dégage autour du chiffre de 170 000 morts.

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(1) CHASSIN, La Vendée patriote Tome 3 p170, cité par SECHER Reynald, «La Vendée-Vengé le génocide franco-français», Perrin 1986, réédition 2006
(2) CARRE, Le général Turreau et les Bourbons, 1980, cité par SECHER Reynald, «La Vendée-Vengé le génocide franco-français», Perrin 1986, réédition 2006
(3,4,5) SECHER Reynald, La Vendée-Vengé le génocide franco-français, Perrin 1986, réédition 2006
(6) BABEUF Gracchus, La guerre de la Vendée et le système de dépopulation, Les éditions du Cerf, Paris 2008

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Les guerres de Vendée racontées par Pierre Devaud

Qui était Pierre Devaud ?

Pierre Devaud est né le 7 juin 1775 aux Cerqueux de Maulévrier, canton de Cholet, à la limite des Départements des Deux-Sèvres et de Maine et Loire. En 1792, année de sa première campagne, il habitait la ferme de Boisdon, située à quelques 500 mètres du bourg, avec son père Jacques et son frère cadet Jean. Il avait alors 17 ans. C’est à Boisdon qu’il dit avoir achevé la rédaction de ses mémoires, le 10 mars 1800.

Plaque commémorative sur la ferme de Boisdon

Le livre de la Gère

Le Livre de la Gère de Pierre Devaud a été imprimé en 1882 par les soins de l’abbé Augereau, curé du Boupère, sous le titre de « Mémoires de Pierre Devaud ». Le texte de cette première édition a été tirée à 120 exemplaires.


L’abbé Augereau avait d’abord pensé « qu’il convenait de traduire le récit de Pierre Devaud et de rétablir au moins les règles de grammaire ». Mais il jugea « qu’il valait mieux ne pas y toucher et reproduire son style avec sa saveur native ».
Pierre Devaud écrit, ou plutôt s’efforce d’écrire en Français, mais sa langue usuelle n’est pas celle qu’il écrit. Pierre Devaud a été alphabétisé en français, mais visiblement, cette alphabétisation reste incomplète. La faute d’orthographe, la graphie, voire les calques linguistiques, les hypercorrections, révèlent une autre langue.

Extrait du Livre de la Gère : les premiers combats de mars 1793

Le 11 mars 1793 je reprie les arme pour me batre, comme étant fuyand nous parcourions les villages des Cerqueu et St Aubin Baubignier et Yzernais nous fime un rasemblement dans le Bois de St Louis, déeque nous fume 70 homme nous marchime sur Maulevrier, les Bleu nous virre venir de loind il prire la fuite a Chollet nous entrime dans Maulevrier le 12 mars au matin nous prime 40 fusits de gerre et 60 hommes de ranfords.
De Maulévrier nous ont retourné dans le bois de St Louis et nous avont trouvez du ranford au nombre de 8 a 9 cent homme de ranford, de la nous avont prie la route de Termantine par Tout le Monde et les forest, cans nous fume a Termantine nous ont trouvez une autre armée des notre et nous etion plus de 15 mille homme, la, sous les ordres du general Dalbet il nous a conduit à Chollet, nous avion 3 piece de Canon et nous voilla à nous batre contre les Choltais, qui étais 1500 homme et 12 petite pièce de Canon, nous prime les 12 piece de canon et 350 Bleu de mort et le restant prie prisonier, nous ont hue 40 homme des notres de morts, nous ont partie de Chollet de la à Nuallier de Nuallier à Vezin de Vezin a Coron la nous ont trouvez les Bleu a la Barrière des Homme qui nous attendais nous les ont batu et prie une piece de canon nomée Marie Janne et thué 40 Bleu et 6 des notre de mort, de Coron nous ont été a Vihiers dont que les abitant avait prie la fuite a Douai, de Vihiers nous ont retourné à Coron de Coron a Vezin de Vezin a Nuaillier de Nuaillier a Termantine de Termantine a Chemilier la les Bleu nous ont laisés une piece de canon, cette une piece de 4, et de Chemilier a St Lorant de la Plaine de St Lorant de la Plaine a Chalonne la nous ont prie 4 piece de canon, de Chalonne à Névie de Névie a St Lézin de St Lézin a la chapelle Rousselin de la chapelle Rousselin a Termantine de Termantine a Yzernais de Yzernais aux Cerqueux de Maulevrier.
Asanblement a Coron

Parcours décrit par Pierre Devaud du 11 au 27 Mars 1793

172 kilomètres de marche à pied, en sabots, en 15 à 20 jours

En mars 1793 c’est toute la région des Mauges qui se soulève, St-Florent, Tiffauges, Chemillé puis la ville de Cholet le 14 mars. Les symboles de la République sont détruits, renversés ou brulés et des exactions sont commises contre les républicains locaux et leurs biens. La garde nationale tire il y a des morts de part et d’autre, c’est le début d’une insurrection générale. Les débuts sont chaotiques, la révolte gagne plus ou moins rapidement les différentes zones géographiques du territoire insurgé qui sera appelé Vendée militaire (zone comprenant le sud de la Loire-Atlantique, le sud-ouest du Maine-et-Loire (région des Mauges) et le nord des Deux-Sèvres (le Bocage). Elle était en outre délimitée par les villes de Nantes, Angers, Saumur, Thouars, Parthenay, Luçon, Fontenay-le-Comte et Les Sables-d’Olonne.

Des ancêtres de notre histoire familiale vont se retrouver combattants au côté de Pierre Devaud, la trace d’une dizaine de membres de la famille Cochard et de membres de la famille Chabosseau est attestée aux premiers combats de Mars 1793 décrits par Pierre Devaud, puis en mai 1793, à la bataille de Thouars.

Qu’est ce qui a tant fait marcher Pierre Devaud et ses camarades ? Même si Le livre de la Gère ne dit rien d’explicite sur les motivations du marcheur, le retour systématique à la ferme familiale après chaque marche, l’usage de la langue régionale révélée par l’écriture du français, disent au moins l’attachement à une terre et l’appartenance à une culture.

Extrait du Livre de la Gère : Incendies de Boisdon et de La Sèvrie, massacre de la forêt de Vezins en mars 1794

Redonnons la parole à Pierre Devaud qui relate dans le livre de la Gère, les attaques des Cerqueux et de Saint Aubin de Baubigné, entre le 12 et le 18 mars 1794 :

Zoulerie, le lendemain 12 mars, les Bleu sont venue par les Saulais et ont mie le feu a Boisdon il ont fait brullez la palle, le foin et la grange, et ont prie la route de la Forais de Vezin et ont fait un grand masacre dans cette Forais. Et nous de Puiaubrain jont été a la Cousais, jont passé cette journée sans joie, de la Cousais nous ont retourné le soir par la Troche jont retourné couchez aux logis de Boisdon.
De Boisdon a la Rochemousset, les Bleu venait a la Sévrie de la aux Zoulerie lermé était a St Aubin et sont venue attaquet les Bleu au Zoulerie et ont Batu les Bleu complement, nous de la Rochemousset jont retourné par les Foucherie a la Cousais de la a la Morignière de la Morignière par les Nousperouse jont été aux Plaisir Neuf, la nous avont trouvez du ranford. Nous avont retourné sur nos pas et les Bleu était ant deroutte et jont trouvez des egallier, nous ant non join un a la Charrenaire nous l’avons poursuivez jusque a Cotreuil j’ai tirre sept coup de fuzits sur lui, le dernié coup de fuzits que j’ai tirré sur lui je lui ai donné dans les rain et il a tombé mort dans le grand champs de Cotreuil il avait 60 dasignats et 20 mouchoir de soies.
De la nous somme tombez aux Serneaux et nous avont trouvez un autre Bleu cachez dans un fossés et il sez levez et nous a demandé a parler au general mais jai accoursie ce compliment, je lui ai donné un coup de fuzie dans le vantre je lui ai donné un autre coup de fuzie et après je lai fouillée il avait 5 dasignats et prie ses depoulle, et du Serneau jont été a Boisdon que jont trouvez le feu dans le restant de nos batiments, la fournie a brullé et nos couette dans la maison, le restant de notre menage a brullez ce jour la cetté le 18 mars jont perdu le 12 et le 18 mars plus de 3000 defait j’ai resté avec les hardes que j’avais sur le cors, le reste ai perdu pour mois.

Pierre Devaud nous raconte en creux l’incendie de sa métairie (Boisdon), celle de La Sèvrie et des fermes alentour n’est pas évoquée et le massacre de la forêt de Vezins est juste signalé. Il s’attarde sur le fait le plus marquant pour lui, le fait qu’il ait tué deux soldats bleus.

Mars 1794 : le massacre de la forêt de Vezins

L’événement de la forêt de Vezins, à Yzernay, près de Cholet eu lieu le 25 mars 1794. Conduite par un traître nommé Porcher, la troupe du général républicain Crouzat pénétra dans la forêt qui servait de quartier-général à Stofflet, d’infirmerie et de refuge à toute la population des environs. L’officier savait que les soldats de l’armée vendéenne étaient absents. Une épouvantable tuerie s’ensuivit : les vieillards, les femmes et les enfants ainsi que les blessés furent impitoyablement massacrés. On compta plus de 1200 victimes.
En 1821, le comte de Colbert, propriétaire des lieux, fait édifier une croix à l’endroit du massacre où ont été enterrées les victimes. Et en 1862, c’est une chapelle qui est construite.

Les liens entre les familles Cochard et Devaud

La tragédie des Margirandières – juin et août 1794

Magdeleine Cochard, 11ème enfant du patriarche Pierre Cochard est née le 19 avril 1768 à la Cantinière, en la commune de Saint-Aubin-de-Baubigné. Elle épouse le 21 juillet 1789, le jour précédant la Grande Peur, Mathurin Challet, de 3 ans son ainé, veuf de Marie Berson. Ses témoins sont : son père Pierre Cochard et son beau-frère Jacques Gourdon.
Le couple s’installe dans l’une des borderies des Margirandières. De cette union vont naître 3 enfants : Magdeleine Rose en avril 1790, Marie en mai 1792 et Mathurin Pierre le 2 juin 1794.
10 jours plus tard, le 12 juin 1794, Mathurin Challet est tué par l’incursion d’une colonne républicaine.
Magdeleine meurt, deux mois plus tard, le 25 août 1794. Meurt-elle des suites de son accouchement ? de coups et blessures reçus en juin ? nous ne le savons pas.
Ils laissent leurs trois enfants âgés de 4 ans, 2 ans et 2 mois, orphelins de père et de mère.

Mathurin Pierre Cochard épouse Jeanne Perrine Devaud

Mathurin Pierre, le petit orphelin, épousera le 13 mai 1823, dans l’église des Cerqueux, Jeanne Perrine Devaud, la petite fille de Pierre Devaud, liant ainsi les familles Cochard et Devaud.

Merci à Michel Dénéchère auteur du site http://lescerqueux.com/ pour m’avoir fait découvrir les écrits de Pierre Devaud

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Les combattants vendéens de la famille Cochard

Pierre Cochard et son fils ainé François qui étaient membres de l’assemblée communale lors de l’établissement du cahier de doléances des Cerqueux en 1789 ont respectivement, 70 et 45 ans en 1793.
Ils vont, sans doute, encourager, soutenir les membres de la famille qui vont combattre mais aucune trace d’eux en tant qu’acteurs directs n’a été retrouvée.
Trois des fils de Pierre, le patriarche qui a eu 19 enfants et l’un de ses gendres vont être combattants de la Grande Armée Catholique et Royale.

Pierre Cochard, 3ème fils du patriarche Pierre

Pierre Cochard, le troisième fils que Pierre a eu avec sa première femme Marie Madeleine Goupil, a 41 ans en 1793. Il a épousé Perrine Henry en 1772 dont il a eu trois fils, Pierre, Louis et Joseph. Il est cultivateur à la Sèvrie.
Il va être de tous les combats de 1793, ceux de Mars décrits par Pierre Devaud mais il participera aussi, aux victoires vendéennes à Chemillé en avril, à Bressuire et à Thouars en Mai, à Coron, Torfou et Saint Fulgent en septembre. Il sera aussi présent lors de la défaite des vendéens à Cholet le 17 octobre puis il va suivre l’armée catholique et royale lors de virée de galerne. Il va passer la Loire, élire La Rochejaquelein généralissime, prendre, avec lui, Laval le 23 octobre. Il sera à Granville le 14 novembre, au Mans le 12 décembre lors des déroutes des vendéens et sera capturé à Savenay le 23 décembre 1793 (3 nivôse an II). Il sera, aussitôt, condamné à mort comme brigand de la Vendée, et exécuté par la commission militaire séante à Savenay.

Pierre Cochard, fils de Pierre, petit-fils du patriarche Pierre

Pierre va entrainer son fils Pierre Cochard né à la Sèvrie le 7 mars 1774, dans cette aventure. Il a épousé Marie Landré, originaire de la paroisse Saint Pierre de Cholet en 1792.
Il a 19 ans lorsqu’il part combattre le 14 mars 1793, il est blessé d’un coup de baïonnette à la cuisse gauche à Martigné-Briand.
Il est charpentier et charron au bourg des Cerqueux pendant la guerre, il va fournir des roues, des moyeux et des planches à l’armée Vendéenne.
Il déclare que pendant le conflit, il lui a été brûlé 40 charretées de planches, des roues, son mobilier, ses effets, 6 charges de grains, le tout pour 8 000 francs.
Comme son père, il est passé outre Loire pendant la virée de galerne, mais lui en reviendra.
Ils auront, lui et sa femme Marie,9 enfants.
Il s’est battu à nouveau en 1799 aux Aubiers et en 1815 aux Echaubrognes et à Thouars.
En 1825, il possède une petite maison qu’il habite pour 47 frs/an.
Il meurt le 8 janvier 1835 à l’âge de 61 ans. Ce sont ses fils, Pierre, Eustache et Esprit Théodore qui déclarent son décès aux Cerqueux de Maulévrier.

Jean Joseph Cochard, 12ème enfant du patriarche Pierre

Le deuxième fils du patriarche Pierre à avoir combattu est son douzième enfant qu’il a eu avec sa deuxième femme Marie Jeanne Augereau.
Jean Joseph Cochard est né le 28 novembre 1769 à la Cantinière. Il a 24 ans lorsqu’il part combattre en 1793. Lui aussi sera de tous les combats, victoires et défaites et lui aussi va participer à la virée de galerne. Il est fait prisonnier avec 98 autres combattants, probablement à Savenay en Décembre 1793. Il est fusillé à Nantes, dans les carrières de Gigant, le 17 Janvier 1794, après avoir été condamné à mort par la commission Bignon.
« Cochart Jean, domicilié à St Aubin, département des Deux-Sèvres, condamné à mort comme brigand de la Vendée, le 28 nivôse an 2 (17 Janvier 1794), par la commission militaire séante à Nantes ». (1)
« Le 28, Jean Cochart et 96 autres sont condamnés à mort… Total, en 10 séances, 1969 condamnations à mort…C’est hors de Nantes, au lieu-dit les Carrières ou les Rochers de Gigant, que ces malheureux étaient fusillés. On employait surtout des hommes ad hoc, des déserteurs allemands, qui, ne sachant pas le français, étaient sourds aux plaintes ». (2)

(1) Vendée historique, 1906, p.196
(2) Charles Berriat-Saint-Prix, La Justice révolutionnaire à Paris et dans les départements, d’après des documents originaux la plupart inédits, 1865

La « commission militaire et révolutionnaire », la plus importante est la dénommée dans l’historiographie « commission Bignon », instituée par les représentants en mission Bourbotte, Prieur de la Marne et Louis Marie Turreau, le 14 décembre 1793, après la bataille du Mans. Transférée à Savenay, puis à Nantes, elle prononce en Loire-Inférieure, du 19 décembre 1793 au 10 février 1794 pas moins de 2637 jugements, dont 2620 condamnations à mort pour rébellion armée, sur simple constatation d’identité, sans entendre de témoins et sans lecture de procès-verbaux d’arrestation ou de dépositions écrites. L’accusé simplement est appelé, son cas est évoqué, et il reçoit presqu’aussitôt la sentence. Les fusillades sont perpétrées non loin de la grande prison de l’Entrepôt à Nantes, dans les carrières de Gigant » (1)

(1) Bruno Hervé, Noyades, fusillades, exécutions : les mises à mort des brigands entre justice et massacres en Loire- Inférieure en l’an II

Nantes

Pierre Cochard, 13ème enfant du patriarche Pierre

Le troisième fils du patriarche à avoir combattu est son treizième enfant qu’il a eu avec sa deuxième femme Marie Jeanne Augereau. Il s’appelle lui aussi Pierre Cochard. Il est né à la Sèvrie le 7 mai 1771, il a donc 22 ans lorsqu’il participe aux combats en 1793. On retrouve la trace de sa participation dans le « Mémoire de proposition de pensions et gratifications » (1816, archives de Clisson). Il épousera Rose Angélique Michel en 1800 aux Cerqueux. Il est alors laboureur à la Sèvrie. Pierre décédera en 1819 à 48 ans.

Perrine Louise Cochard, 8ème enfant du patriarche Pierre, veuve de Jacques Gourdon

Perrine Louise Cochard, 8ème enfant du patriarche est née en 1761. Elle épouse, en premières noces, Jacques Richard, le 25 septembre 1782 à Etusson. Suite au décès de celui-ci, elle se remarie avec Jacques Gourdon le 29 mai 1786 aux Cerqueux de Maulévrier. Celui-ci sera tué au combat à Saint Aubin de Baubigné en 1793.

Perrine Louise perçoit une pension de 50 francs en 1816, en tant que veuve d’un combattant vendéen.

27 juin 1816 : Pensions accordées à 319 veuves d’anciens combattants et à 2 femmes blessées : noms des militaires, grade, noms des veuves, domicile (commune et arrondissement), montant de la pension. Archives départementales de la Vendée : https://etatcivil-archives.vendee.fr/ark:/22574/s005dfad1e460098/5dfad1e53b510

Louis Cochard, neveu du patriarche Pierre

Louis COCHARD le frère de Pierre le patriarche a eu un fils avec son épouse Jeanne Guesdon, lui aussi nommé Louis Cochard en 1752 à la Grande Goinière de Saint Aubin de Baubigné.
Il est cultivateur à « La Grande Goinière » et « Les Roches Mousset » et enfin à la Sèvrie avec son épouse Marie Banchereau qui lui donnera un fils, Jean, lui aussi blessé pendant le conflit.
Il fera les 3 guerres (1793, 1799 et 1815) et en 1793 recevra un coup de feu au bras gauche qui le gênera par la suite dans les mouvements.
Il figure sur l’état nominatif des militaires de l’armée vendéenne ayant droit à une seule indemnité de 100 francs en1815. (1)

(1) Archives départementales du Maine et Loire,1 M 9-15

Jean Cochard, fils de Louis, petit neveu du patriarche Pierre

Jean Cochard le fils de Louis est né à la Sèvrie, le 7 juillet 1771.
Dans le « Mémoire de proposition de pensions et gratifications » (1816, archives de Clisson), on trouve Jean Cochard, blessé aux combats de Thouars et la Chataigneraie mais aussi aux Archives Départementales des Deux-Sèvres (R67-200) en1824, Aide aux anciens soldats :
Jean Cochard soldat a reçu 2 coups de feu à la jambe gauche et à l’épaule gauche aux batailles de Thouars et de la Chataigneraie

Il ne fera que la campagne de 1793 et sera classé comme « estropié » en 1825.
Il était tisserand Cultivateur à la Sèvrie. En janvier 1810 il épousera Thérèse Chabosseau (qui n’est pas issue de la famille Chabosseau des 4 familles). Jean Cochard décédera en 1838 au village de Gaudy à Saint Aubin de Baubigné, à 67 ans.
Le beau-frère de Jean, Pierre Chabosseau sera, lui aussi, blessé de 2 coups de feu à la cuisse gauche et à l’épaule gauche au combat de Jallais.

Perrine Françoise Cochard, fille de François, petite fille du patriarche Pierre, veuve d’André-Gervais Brouard

André-Gervais Brouard est né en 1777 aux Cerqueux. Il est le fils de Joseph et de Perrine Renaudin. Il est cultivateur à la Petite Foucherie en 1813, année où il épousera Perrine Françoise Cochard, l’une des filles de François Cochard, petite fille du patriarche Pierre, née en 1790 à l’Augerie. Ils auront une fille, Françoise.
Engagé très jeune à16 ans dans le conflit, il servira comme soldat et passera la Loire.
Il décède à 42 ans en 1819 et sa veuve obtiendra un secours de 50 frs après 1830. (1)

(1) Archives départementales du Maine et Loire, Dossiers Vendéens

Son frère François combattit à ses côtés et fut blessé, et 3 de ses cousins : François Martin, Louis et Perrine Brouard furent tués.

Magdeleine Cochard, 11ème enfant du patriarche Pierre et son mari Mathurin Challet

Tragédie aux Margirandièresjuin et août 1794

Magdeleine Cochard, 11ème enfant du patriarche Pierre est née le 19 avril 1768 à la Cantinière, en la commune de Saint-Aubin-de-Baubigné. Elle épouse le 21 juillet 1789, le jour précédant la Grande Peur, Mathurin Challet, de 3 ans son ainé, veuf de Marie Berson. Ses témoins sont : son père Pierre Cochard et son beau-frère Jacques Gourdon.
Le couple s’installe dans l’une des borderies des Margirandières. De cette union vont naître 3 enfants : Magdeleine Rose en avril 1790, Marie en mai 1792 et Mathurin Pierre le 2 juin 1794.

10 jours plus tard, le 12 juin 1794, Mathurin Challet est tué par l’incursion d’une colonne républicaine.

Magdeleine meurt, deux mois plus tard, le 25 août 1794. Meurt-elle des suites de son accouchement ? de coups et blessures reçus en juin ? nous ne le savons pas.
Ils laissent leurs trois enfants âgés de 4 ans, 2 ans et 2 mois, orphelins de père et de mère.

Mathurin Pierre, le petit orphelin, épousera le 13 mai 1823, dans l’église des Cerqueux, Jeanne Perrine Devaud, la petite fille de Pierre Devaud (auteur du livre de la Gère) , liant ainsi les familles Cochard et Devaud.

Les combattants vendéens de la famille Cochard Lire la suite »

La tribu Cochard s’installe entre les Cerqueux et Saint Aubin de Baubigné avant la Révolution

Pierre Cochard, le patriarche prolifique 

1747
Pierre Cochard se marie avec Marie Goupil :
« le  27 novembre 1747, après les fiançailles en la publication de trois bans faites tant en cette église qu’en celle de Saint Aubin de Baubigné et en le témoignage de monsieur le curé qu’il n’a été trouvé aucun empêchement canonique je Curé soussigné avoir reçu le consentement mutuel du mariage de Pierre Cochard, fils mineur de François Cochard et de défunte Anne Ouvrard __ de la paroisse de Saint Aubin de Baubigné et de Marie Goupil, fille mineure de défunt Mathurin Goupil et de Louise Jalteau vu en cette paroisse ensuite de quoy je les ay par paroles de présent conjoints en mariage et leur ay donné la bénédiction nuptiale en présence de François Cochard père du proparlé, Hugues Cochard son oncle . Louise Jalteau mère de la proparlée, de Jean Goupil son frère, de Jean Jalteau son oncle et plusieurs autres personnes qui ne disent ne pas savoir signer sauf le soussigné (signature de Jean Goupil) »
Coudrin Curé des Cerqueux de Maulévrier

De cette union vont naitre neuf enfants.

1748
Le 6 novembre 1748 Pierre Cochard qui habite alors La Grande Goinière à Saint-Aubin-de-Baubigné fait baptiser son premier fils François en l’église des Cerqueux de Maulévrier. Le village des Cerqueux étant beaucoup plus près de la Goinière que celui de Saint Aubin.
L’acte est signé par le curé Coudrin. Le parrain est François Cochard, le frère de Pierre, et la marraine est Louise Jalteau.

1763
François Cochard a seize ans lorsque sa mère Marie décède suite à l’accouchement de son neuvième enfant, Jeanne, la petite sœur de François, née le 21 décembre 1763. François est déjà soutien de famille, il aide son père aux travaux des champs et s’occupent de ses frères et sœurs quant-il le peut.

1765
Après le décès de Marie Goupil en 1764, Pierre Cochard se remarie avec Jeanne Ogereau, dont il aura quatre enfants.

1775
Après le décès de Jeanne Ogereau, Pierre Cochard se remarie pour la troisième fois avec Mathurine Charbonnier le 21 février 1775. De cette union vont naitre six enfants.

Pierre Cochard se sera marié 3 fois et aura engendré 19 enfants en 42 ans. Il aura vu la naissance de son premier enfant alors qu’il était âgé de 25 ans et celle du dernier à l’âge de 67 ans.

La tribu Cochard s’ancre sur un territoire regroupé autour du château de la Sévrie

La famille, la tribu (80 individus), Cochard s’implante progressivement entre Les Cerqueux de Maulévrier et Saint Aubin de Baubigné, qui était alors un seul et même territoire, dans les fermes et les métairies propriété de la famille de la Haye-Montbault, occupant du Château de la Sèvrie ou de la famille Monnier propriétaire du Château de la Cantinière.

Archives Départementales des Deux-Sèvres, Saint Aubin de Baubigné, cadastre napoléonien

Archives Départementales des Deux-Sèvres, Saint Aubin de Baubigné, cadastre napoléonien Les Margirandières

Les Cochard vont occuper la ferme de la Sèvrie, celles de la Roche Mousset et de la petite Roche Mousset, de la Goinière et de la Petite Goinière, Le Pinier, La Cantinière et Les Margirandières.

François Cochard, digne successeur de son père

1776
A 28 ans, François, le fils ainé de Pierre, se marie avec Marie Vigneau née en 1753, de cinq ans sa cadette. Ils vont avoir quatre enfants.
Marie, décède, comme la mère de François, des suites de l’accouchement de leur dernier enfant, prénommée également Jeanne.

1783
Le 21 mai 1783, François se remarie avec Marie Chapeau en l’église de Saint-Aubin-de-Baubigné. L’acte est signé par Gautronneau, vicaire, les témoins sont Pierre Cochard, son père, Mathurine Charbonnier, sa deuxième belle-mère, Perrine Logeais, la mère de Marie et Pierre Besson. De cette union naîtront sept enfants.

François se sera marié 2 fois et aura engendré 11 enfants en 25 ans.

Pierre et François, signataires du cahier de doléances des Cerqueux de Maulévrier

Article 1 : Nous demandons l’abolition de la gabelle en général, attendu les inconvénients qui en résultent
Article 2 : L’abolition de la taille en général pour y substituer un impôt tellement fondé en principe que chaque individu connaissant ses facultés puisse connaître sa taxe en raison de celle de la paroisse
Article 3 : La suppression des privilèges pécuniaires et des nobles et des ecclésiastiques
Article 4 : La suppression des privilèges des habitants des villes et des particuliers qui sont taxés d’office pour supporter comme les autres sujets du Roy un impôt égal
Article 5 : Nous désirons l’établissement d’Etats paroissiaux pour la province d’Anjou distincts et séparés de ceux des provinces du Maine et de Touraine, dans lesquels Etats paroissiaux, le Tiers Etat sera pour moitié et dans cette moitié que les habitants des campagnes comme le plus nombreux en forment les quatre cinquièmes
Article 6 : Nous désirons la continuation des assemblées municipales et que ces assemblées soient chargées de la juste répartition des impôts et de présenter aux Etats provinciaux les besoins de la paroisse pour être autorisés à établir des taxes particulières et rendre compte aux Etats provinciaux de la répartition et emploi des fonds sans intervention ni inspection des intendants et subdélégués
Article 7 : Nous demandons l’abolition des huissiers priseurs-vendeurs de meubles
Article 8 : La suppression des droits d’aides et remboursement des traites aux barrières du royaume pour faciliter le commerce interne
Article 9 : Nous désirons que la perception, collecte et comptabilité soit faite et versée par les paroisses aux Etats provinciaux, lesquels verseront eux-mêmes directement dans le Trésor Public le produit des impôts de leur province
Article 10 : Qu’il soit établi un impôt particulier sur les gens à portefeuille, négociants, rentiers
Article 11 : Qu’il soit établi dans la paroisse un hospice pour les pauvres et que l’assemblée municipale puisse être autorisée dans les temps de calamités à établir une taxe pour le soulagement des malheureux sous l’inspection des Etats provinciaux
Article 12 : La réformation des droits de contrôle et la suppression des droits de francs-fiefs et de centième denier pour les successions collatérales
Article 13 : Que les bois et étangs soient sujets aux oppositions comme les autres fonds
Article 14 : Que partie des deniers que la paroisse paye pour la réparation des chemins royaux soit employée et destinée à la réparation des chemins de la paroisse en ayant le plus grand besoin est qu’au lieu d’être occupé à travailler au grand chemin et à un atelier de charité ils ne pourront être occupé qu’à l’un ou l’autre seulement
Article 15 : Nous demandons qu’au lieu d’être forcés au tirage de la milice et de se transporter à la subdélégation, ce qui occasionne de grands frais, la paroisse s’oblige de fournir les hommes de bonne volonté qu’elle sera obligée de fournir au Roy parce qu’un pauvre père qui n’a qu’un fils qui fait toute sa ressource s’en trouve privé

Le présent cahier de doléances (Archives départementales de Maine et Loire, Cahier de doléances 1789, Les Cerqueux de Maulévrier, cote 1B 61, n° de chemise : 11, Le Moy (André), Cahiers de doléances et corporations de la ville d’Angers et des paroisses de la sénéchaussée, Angers, Burdin, 2 vol. 1915-1916) a été fait et arrêté par les habitants de la paroisse des Cerqueux de Maulévrier en présence de nous, Pierre François Mondelet, avocat postulant de la ville et du comté de Maulévrier assisté de Maitre René François Bodi, notaire du comté de Maulévrier que nous avons commis comme notre greffier dont nous avons donné acte aux habitants qui savent signer.

Le cahier de doléance est ensuite lu et soumis à l’assemblée du village réunie :
« Aujourd’hui quatrième jour de Mars 1789 en assemblée convoquée au son de la cloche en la manière accoutumée ont comparu au bourg et paroisse des Cerqueux en la maison de Felix Leroux, aubergiste, lieu désigné à cet effet par devant nous Mondelet avocat postulant de la ville et du comté de Maulévrier assisté de Maitre René François Bodi, notaire du comté de Maulévrier que nous avons commis greffier…
Tous nés français ou naturalisés, âgés de 25 ans compris dans les rôles des impositions, (Votaient au général les hommes de plus de vingt-cinq ans qui payaient au moins 10 livres d’impôts par an (environ 150 euros d’aujourd’hui)) habitants tant de ce bourg que de cette paroisse composée de cent feux ou environ…
…lesquels pour obéir aux ordres de sa majesté, portées par ses lettres données à Versailles le 24 janvier dernier pour la convocation des Etats Généraux du Royaume et satisfaire aux dispositions du règlement annexe ainsi qu’à l’ordonnance de Monsieur le Lieutenant particulier de la Sénéchaussée d’Angers […] du 14 février dernier dont ils nous ont déclaré avoir une parfaite connaissance tant pour la lecture qui vient de leur en être faite, que par la lecture et publication faite le dimanche courant au prône de la messe de la paroisse par Monsieur le Curé dudit lieu et par la lecture, publication et affiche parallèlement faite au-devant de la porte de l’Eglise…

Pierre Cochard et son fils ainé François sont membres de l’assemblée communale et signataires du cahier de doléances, ce qui indique qu’ils faisaient partie des métayers qui payaient au moins 10 livres d’impôts par an, les classant ainsi dans la catégorie des laboureurs évoqués par Ernest Pérochon dans son roman Nêne, ce qui nous laisse présumer qu’à défaut d’être riches ou à l’aise, ils n’étaient pas non plus indigents ou mendiants.

Dans ce cahier de doléances des Cerqueux, les habitants se montrent plutôt progressistes, réclamant notamment avec insistance la suppression de la gabelle et des mesures pour aider les pauvres. Le cahier a été établi avant l’assemblée communale et il est rédigé de la main du greffier, René-François Bodi, notaire. Il reflète, probablement plus, l’opinion de la famille Bodi dont le père avait été Procureur fiscal du comté de Maulévrier et dont l’un des fils, Victor Bodi, devint avocat en 1776 puis fut élu, juge de paix du canton de Maulévrier, que celles des habitants, pour la plupart analphabètes et surement moins au fait des connaissances et informations dont disposait le notaire.
Article 1 : L’Anjou était pays de « Grande Gabelle ». Le Poitou faisait partie des provinces « rédimées » où l’on payait le sel de 8 à 10 fois moins cher qu’en Anjou. Les marches communes d’Anjou et du Poitou consistaient en une bande de territoire située à cheval sur les deux provinces. C’est au travers de cette bande de terrain qu’œuvraient les « faux-sauniers », les contrebandiers de sel.
Article 2 : La taille était l’impôt roturier par excellence. Mais nombre de roturiers étaient exemptés de taille : bas officiers de justice et de finances, bourgeois de certaines villes, laquais des riches, etc. Or la taille était un impôt de répartition, c’est-à-dire que le gouvernement en fixait chaque année le montant. Dès lors, plus grand était le nombre des exemptés, plus lourd était le poids de l’impôt pour ceux qui le payait.
L’article 7 qui réclame l’abolition des huissiers priseurs-vendeurs de meubles semble être une revendication contre les bourgeois. Était-elle le reflet du ressentiment des habitants des Cerqueux ?
Le 8ème article traduit, lui, la volonté de « protéger » le pauvre à ne pas sombrer dans la mendicité, considérée comme un délit. En effet, « un tiers des habitants vivaient de mendicité ; l’autre tiers de gêne ou de mendicité ».

A la lecture du cahier de doléances des Cerqueux, les habitants semblent souhaiter des évolutions ; moins d’impôts, plus d’autonomie dans la prise de décision, expriment des ressentiments vis-à-vis des profiteurs, gens à portefeuille, négociants, rentiers, souhaitent que les fils ne soient pas enrôlés dans la milice et qu’ils puissent réparer leurs chemins plutôt que ceux du Roi.

Ils ne semblent pas défavorables au monde nouveau qui s’annonce… mais pourtant…

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Michel-Victor Chabosseau, l’insurgé

Une naissance sous le signe impérieux d’assurer la succession

Le 19 avril 1780, tout juste dix mois après le mariage de ses parents, naît Michel-Victor Chabosseau à la ferme de la Girouardière, sur la commune de Coron.
Ses parents fondent beaucoup d’espoirs sur ce fils ainé…
Etienne, le grand-père de Michel-Victor a été une grande partie de sa vie, journalier, domestique allant de borderies en métairies pour se placer. Ce n’est que par un concours de circonstances qu’il a pu épouser sa patronne Jeanne Froger et devenir ainsi métayer.
Michel, le père de Michel-Victor vient toute juste de prendre la suite de son père à la tête de la ferme à la naissance de son fils.
Il a une conscience aigüe de la possibilité de perdre cette position sociale. Il veut enraciner, sécuriser sa famille et établir une continuité dans la transmission de la ferme. Ils ont eu tant de mal lui et son père, à ne pas être considérés comme des usurpateurs, des profiteurs, des coucous.
Par chance, le premier enfant que lui a donné sa femme Jeanne est un fils. La succession va pouvoir être assurée. Michel-Victor sera le premier des Chabosseau, à être reconnu comme un laboureur de souche, comme un natif, comme un patron.
Pour forger le caractère de son fils et de ses autres enfants, Michel est sévère avec eux et les fait trimer dur. Dès qu’ils sont en âge, ils conduisent les bêtes aux champs, ils ramassent les choux et les raves même les matins ou le froid donne l’onglet. Celui qui ne fait pas sa part de labeur est sévèrement puni. Pas de pain si le travail n’est pas fait. Une nuit dans la soupente si la punition doit être plus dure.
Cette vie de dur labeur et de réprimandes paternelles promise à Michel-Victor va bientôt prendre un tournant tout autre.

Dès l’âge de 13 ans, Michel-Victor ne va pas suivre le chemin qui lui était tracé

A 13 ans, Michel-Victor s’engage dans l’armée catholique et royale dès la première bataille de Coron, le 16 mars 1793. Fuit il son père trop rude, rêve-t-il d’aventures, est-il entrainé par d’autres ? Nous ne connaissons pas ses motivations.
Michel-Victor va suivre l’armée blanche dans tous ses combats. Quand il ne participe pas aux rassemblements, il revient à la métairie pour participer aux travaux de la ferme.
La participation de Michel-Victor à tous les soulèvements vendéens nous est connu par la demande de pension qu’il fait rédiger le 31 mai 1825, 2 jours seulement après le sacre de Charles X à Reims.

Commune de La Plaine
Armée d’Anjou et Haut Poitou
Etat de service – Chabosseau (Michel Victor) – 
A fait la guerre en 1793 et 1794 sous les ordres de feu Monsieur Henry De la Rochejacquelein Général de l’armée Royale vendéenne
En 1795 et 1796 sous les ordres de feu Monsieur Stofflet général de la susdite armée
Et en 1799 sous les ordres de Monsieur le Comte d’Autichamps et de feu Monsieur le Chevalier de Vezin
En 1815 il reprit les armes sous les ordres de Messieur De la Rochejacquelein
Nous François Cailleau chef de bataillon, Armand Debillot ancien Adjudant major de la 2ème division du 4ème corps d’armée de l’ouest et Jacques Chatet, ancien capitaine certifions que Michel Victor Chabosseau a servi sous nos ordres en qualité de soldat en 1793 jusqu’en 1796 et en 1799.
En 1815 a repris les armes au retour de l’usurpateur.
Et Michel a point quitter qu’au retour de sa Majesté Louis dix-huit. 
Je soussigné François Proust maire de la Commune de La Plaine, Canton de Vihiers, Arrondissement de Saumur, Département de Maine et Loire, certifie que Michel Victor Chabosseau cultivateur ne jouit d’aucune pension ni secours sur les fonds de l’Etat ; que ses moyens d’existance consiste de cultiver la terre pour pourvoir aux besoins de sa vie
A la mairie de La Plaine le 31 mai 1825
Proust (1)

Il quitte la ferme familiale à 20 ans, veut se marier mais ses parents s’y opposent

A tout juste 20 ans, Michel-Victor quitte la ferme familiale. Il trouve à s’embaucher comme meunier chez les parents d’un de ses compagnons d’armes sur la commune de La Plaine.
Deux ans, plus tard, il fait la connaissance de Marie Chéné, une fille de La Plaine. Ils se fréquentent et pensent bientôt à se marier… Mais quand il informe ses parents (Michel Chabosseau et Jeanne Brunet) de ce projet, ceux-ci s’opposent à ce mariage.
Michel Victor alors âgé de 25 ans, n’a plus à demander le consentement de ses parents, au regard du Code Civil Napoléonien de 1804, qui pose de nouvelles règles en matière de mariage :

  1. Conformément à l’ancienne tradition coutumière, il établit une majorité spéciale, la « majorité matrimoniale », distincte de la « majorité ordinaire » : les garçons ont besoin du consentement de leurs parents jusqu’à 25 ans et, tant qu’ils n’ont pas atteint cet âge, ils sont réputés « mineurs » quant au mariage ; pour les filles, au contraire, la « majorité matrimoniale » coïncide avec la « majorité civile », soit 21 ans. Il faut attendre la loi du 21 juin 1907 pour faire cesser cette disparité.
  2. Si les futurs époux ayant la « majorité matrimoniale » peuvent se marier sans autorisation parentale, ils n’en sont pas moins tenus par la loi de demander le « conseil » de leurs parents ou de leurs grands-parents, ou, à défaut, de leur notifier leur projet de mariage par des actes respectueux.

Sommation respectueuse puis mariage

Michel-Victor ne souhaite pas déroger à la coutume et il entend obtenir conseil de ses parents, à défaut d’obtenir leurs consentements. Mais, ses parents, principalement son père, restent sur leur position et font savoir leur opposition à ce mariage à chaque fois que leur fils vient les voir et leur demander de consentir à ce mariage.
Le 27 Floréal an XIII (17 mai 1805) il demande au notaire de Coron, Maître Patou d’adresser une sommation respectueuse à ses parents pour obtenir leurs consentements à son mariage avec Marie Chéné :

Sommation respectueuse par Michel Victor CHABOSSEAU à Michel CHABOSSEAU et Jeanne BRUNET, ses père et mère
Le 27 Floréal an XIII
Napoléon 1er par la grâce de Dieu et la constitution de l’Etat Empereur des Français et roi d’Italie à tous présentant avenir salut et avenir faisons que
Devant nous Pierre Patou notaire public résident à Coron arrondissement de Saumur Département de Maine et Loire soussigné et en présence des témoins ci-après nommés
A comparu Michel Victor Chabosseau garçon majeur âgé de 25 ans accomplis du 29 germinal dernier an XIII demeurant présentement au moulin de la Thibaudière commune de La Plaine
Issu du légitime mariage de Michel Chabosseau avec Jeanne Brunet, ses père et mère demeurant à la Petite Chèvrie commune de Coron
Lequel nous a dit que désirant depuis très longtemps se marier légalement avec Marie Chéné fille majeure demeurant avec sa mère aux Bousselières commune de La Plaine, fille probe, laborieuse, ayant de bonnes mœurs et tenant une conduite rangée et régulière qui lui a fait mériter l’estime des honnêtes gens

Et avoir plusieurs fois sollicité avec un profond respect lesdits Michel Chabosseau et Jeanne Brunet, ses père et mère de vouloir bien consentir à se qu’il épousa la dite Marie Chéné sans pouvoir obtenir leur consentement
Pourquoi désirant faire constater sa soumission et son respect envers ses dits père et mère
Acte conforme à l’article 252 arrêté le 21 ventôse de l’an XII additionnel à la loi du 26 ventôse de l’an XI il nous requiert de vouloir bien nous transporter à la métairie de la Petite Chèvrie commune de Coron au domicile de ses susdits père et mère pour leur notifier qu’il désirait instamment obtenir leur consentement pour le mariage qu’il voulait contracter avec la dite Marie Chéné et pour leur dire qu’il les suppliait très respectueusement par notre organe et notre ministère de vouloir bien donner leur adhésion
en conséquence de cette réquisition nous notaire susdit et soussigné accompagné des citoyens Nicolas David et Joseph Dominique Marie Vallée demeurant tous les deux commune de Coron
ou étant arrivés et ayant trouvés les dits Michel Chabosseau et Jeanne Brunet, sa femme nous leur avons dit que leur fils Michel Victor Chabosseau nous mande ce jourd’hui auprès d’eux par notre organe et ministère sa supplication respectueuse qu’il leur avait fait verbalement  plusieurs fois avant  ce jour et qu’il les priait et suppliait d’abandonner, par la présente de vouloir bien consentir à son mariage avec la dite Marie Chéné  en qui il a mis depuis très longtemps son amitié et qui est un parti qui lui convient
lesquels nous ont dit savoir
la dite Jeanne Brunet, sa mère que puisque Michel-Victor Chabosseau son fils paraissait absolument décidé à se marier avec la dite Marie Chéné, elle ne voulait pas plus longtemps le contrarier en refusant son consentement  pourquoi elle déclarait par la présente consentir à ce mariage
et le dit Michel Chabosseau père qui jusqu’à ce moment avait refusé son consentement à ce mariage dans l’espérance que son fils pourrait changer de sentiment et de décision  mais que voyant qu’il persévérait toujours et qu’étant majeur de 25 ans il employait envers lui le moyen que lui fournit et procure la loi pour parvenir à terminer le mariage
il déclarait par la présente consentir à ce que son fils Michel-Victor Chabosseau se maria avec la dite Marie Chéné aussitôt qu’il le voudra et qu’il le dispensait de lui faire d’autre sommation respectueuse afin d’éviter les frais
De tout ce que nous avons dit le présent acte pour valoir au dit Michel-Victor Chabosseau fils ce que de droit et de raison
Fait et passé à la métairie de la Petite Chèvrie commune de Coron le 27 Floréal An XIII en présence
des citoyens Nicolas David et Joseph Dominique Marie Vallée témoins et lecture faite les parties ont déclarer ne savoir signer
Mandons et ordonnons à tout huissier de justice de mettre la présente à exécution
A tout officier civil de la force de prêter forte quand ils se seront légalement requis
Et à tout procureurs impériaux près des tribunaux
La minute des présentes est signée David, Vallée et nous Patou notaire soussigné
Enregistré à Vihiers le 1er prairial de l’An XIII
Reçu 1 franc dix centimes
Signé Baranger pour le receveur général » (2)

Par cet acte, Michel-Victor a, enfin, obtenu les consentements de ses deux parents et le 28 mai 1805 (8 Prairial An XIII) il se marie avec Marie Chéné à La Plaine, Département de Maine et Loire :

Du 8ème jour du mois de Prairial An XIII de la république française sur les 6h du matin
Acte de mariage de Michel Victor Chabosseau meunier âgé de 25 ans né commune de Coron, Département de Maine et Loire ,demeurant en cette commune, fils de Michel Chabosseau cultivateur demeurant commune de Coron, Département de Maine et Loire et de Jeanne Brunet tout les deux consentant d’après la sommation respectueuse à eux notifier par le citoyen PATOU, notaire à Coron le 27 Floréal dernier en présence des citoyens Nicolas David et Joseph Dominique Marie Vallée enregistrée en ce lieu le 1er de ce mois
Et Marie Chéné âgée de 22 ans née et domiciliée en cette commune, Département de Maine et Loire, fille du défunt Germain Chéné, menuisier de son vivant demeurant en cette commune, Département de Maine et Loire et de Marie Egremond ici présente, ses père et mère
Ses actes préliminaires sont extraits des registres des publications de mariage faites à la mairie le 15 et le 22 Floréal dSes actes préliminaires sont extraits des registres des publications de mariage faites à la mairie le 15 et le 22 Floréal dernier entre
Michel Victor Chabosseau, meunier âgé de 25 ans, né commune de Coron, Département de Maine et Loire demeurant en cette commune, fils de Michel Chabosseau cultivateur demeurant commune de Coron, Département de Maine et Loire et de Jeanne Brunet, ses père et mère
Et Marie Chéné âgée de 22 ans née et domiciliée en cette commune Département de Maine et Loire fille du défunt Germain Chéné menuisier de son vivant demeurant en cette commune Département de Maine et Loire et de Marie Egremond ici présente, ses père et mère
Et affichés au terme de la loi le 15 et le 22 Floréal dernier
De tout informé, de tout les quatre actes, il a été donné lecture par moi officier public au terme de la loi les dits époux présent ont déclaré prendre en mariage
L’un Marie Chéné, L’autre Michel Victor Chabosseau
En présence de
Pierre Froger tisserand âgé de 69 ans demeurant en cette commune, Département de Maine et Loire, frère de l’épouse à cause de Catherine Chéné
Pierre Paquier, tisserand âgé de 35 ans, demeurant en cette commune, Département de Maine et Loire, ami de l’époux
Mathurin Brunet, bordier âgé de 45 ans, demeurant en cette commune, Département de Maine et Loire, ami des époux
Jean Brémond, bordier âgé de 26 ans, demeurant en cette commune, Département de Maine et Loire, ami des époux
C’est pourquoi, moi, Fradin, maire de cette commune, faisant ses fonctions d’officier public de l’état civil, ai prononcé qu’au nom de la loi les dits époux sont unis par le mariage et ont les dits époux et témoins déclarés ne savoir signé sauf le citoyen Paquier
Lecture donné aux parties comparantes – Signatures : Fradin et Paquier (2)

Quelle était la cause du désaccord entre Michel Victor et ses parents ?
L’engagement de Michel-Victor dans l’armée vendéenne ?
Le déshonneur que représente le fait que le fils aîné n’ai pas repris les rênes de la métairie aux côtés de ses parents ?
L’ingratitude ressentie par les parents d’avoir été délaissé par leur fils ?
L’indépendance d’esprit de Michel-Victor ?
La personnalité de Marie Chéné ?
La mésalliance que cette union représentait aux yeux des parents ?
Nous ne le saurons pas.

Michel-Victor et Marie s’installeront dans une borderie sur la commune de La Plaine où ils auront 8 enfants. Marie y décèdera le 20 janvier 1840, Michel Victor lui survivra trois ans et s’éteindra le 18 octobre 1843 à l’âge de 63 ans.

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(1) Archives Départementales du Maine et Loire, Dossiers Vendéens, 1M9/98, Demande de pension, 31 mai 1825
(2) Archives Départementales du Maine et Loire, La Plaine, Naissances, Mariages, Décès, 1792-1812, 6E240/6

Michel-Victor Chabosseau, l’insurgé Lire la suite »

Comment la ferme de La Girouardière devint le lieu de vie de la famille Chabosseau

La famille Frételière

Urbain Frételière et son épouse Perrine Rabin s’établissent à la Girouardière peu après leur mariage en novembre 1697. Ils sont les nouveaux occupants de cette métairie, d’une vingtaine d’hectares. Ils vont y élever quelques vaches et une dizaine de brebis et leur suite. Ils vont aussi y cultiver du seigle, du baillarge (de l’orge de printemps), des pois verts, des choux et des raves. Quelques pâtures sont aussi nécessaires pour nourrir le cheptel et les bœufs de labour. Le jardin et les quelques fruitiers vont apporter la base de l’autosubsistance de la famille. Les bonnes années, ils cultiveront une boisselée de lin que Perrine pourra filer.

Plan cadastral napoléonien1838
Capture d’écran Google Earth février 2022

De leur union vont naître cinq enfants, trois filles et deux garçons. Françoise, la fille ainée voit le jour en 1701, vont suivre Urbain, Louise, Perrine et Michel en 1707.

Urbain meurt le 10 janvier 1723 à l’âge de 44 ans. Ses enfants sont âgés de 22 ans pour l’ainée et de 16 ans pour le plus jeune. La famille va faire face pour maintenir la métairie en bon état de fonctionnement. C’est Michel le fils cadet, qui va finalement rester à la ferme pour succéder à ses parents. Sa mère Perrine, malade, presse son fils de se marier et associe le nouveau ménage à l’exploitation de la ferme dans le contrat qui va être établi lors du mariage. Michel se marie avec Jeanne Froger le 2 juillet 1743 et devient le chef de ménage et le nouveau métayer de la Girouardière. Perrine meurt en février 1744.

Michel et Jeanne vont donner naissance à trois filles, Jeanne née en 1745, Françoise en 1747 et Michelle en 1750. Michel qui est comme son père de constitution fragile, fait appel à des journaliers pour l’aider ou le suppléer dans les tâches les plus rudes de la ferme, en particulier pour les labours et l’ensemencement des boisselées de céréales et le ramassage des foins.

Etienne Chabosseau

Etienne Chabosseau est l’un de ces journaliers qui se place comme valet de ferme à la Toussaint. Il est le quatrième enfant de l’union de son père Mathurin et de sa mère Marie qui auront ensemble sept enfants. Juste après la mort de sa mère en juin 1741, en octobre 1741 son père se remarie avec Françoise, sa belle-mère, dont il va avoir deux autres enfants. Son père se remariera une troisième fois, à la mort de sa deuxième épouse.
Etienne, comme beaucoup d’enfant de familles nombreuses pauvres, est placé très jeune. Il sera placé puis se placera lui-même dans les borderies ou les métairies de Nuaillé, d’Yzernay ou de Coron.

Il se placera à plusieurs reprises chez les Frételière à la Girouardière. Il fallait trimer dur, la soupe était quelquefois mal beurrée mais il s’entendait bien avec ses patrons Michel et Jeanne. Comme son père, Michel Frételière meurt à 44 ans, le 21 mai 1751. Sa femme Jeanne reste seule avec ses trois filles. La situation de Jeanne est la même que celle qu’a connu sa belle-mère Perrine mais elle n’a pas de fils pour l’aider, pour reprendre la suite. Heureusement il y a Etienne, son valet de ferme, qui a l’habitude des travaux à effectuer et qui a déjà beaucoup seconder son mari, ces dernières années.

Coron Chapelle Notre Dame de Vertu
Notre Dame des Vertus

Le 5 juin 1753, Etienne Chabosseau, alors âgé de 28 ans, se marie avec sa patronne Jeanne Froger, veuve de Michel Frételière, de onze ans son ainée.

Le 15 mars 1754 Etienne vient faire baptiser leur fils Michel par le curé Frémit dans la chapelle Notre Dame des Vertus dans le bourg de Coron. Il est accompagné de Michel Goubault, son voisin de la Petite Chévrie ainsi que de sa belle sœur Marie Magdelaine Froger.
Etienne s’est installé maintenant dans la ferme à demeure et a repris le métayage de la Girouardière.
Trois ans, plus tard, Jeanne, bien qu’âgée de 43 ans donne naissance à leur fille Marie, qui décédera à l’âge de 19 ans en 1776.

Michel Chabosseau

En 1779, Michel Chabosseau a maintenant 25 ans. C’est lui, le seul fils de la famille, qui assure la plus grande partie du travail de la ferme, il panse les animaux, il laboure et ensemence les champs, il fauche les prés bas et rentre les foins.
Sa mère Jeanne s’en est allé en 1777 et son père Etienne décline de plus en plus.

Il fréquente Jeanne Brunet, une fille de Coron, qu’il rencontre à chaque assemblée, le dimanche.
Le frère de Jeanne Brunet, Martin s’est marié avec Françoise Frételière, sa demi-sœur, la deuxième fille que sa mère Jeanne a eu de son premier mariage.
Michel Chabosseau et Jeanne Brunet se marient le 21 juin 1779.
Le père Retailleau leur donne la bénédiction nuptiale en présence d’Etienne, le père de Michel, de Pierre Brunet et Renée Gourichon, les parents de Jeanne, de Martin Brunet, le frère de Jeanne, Michel et Jean Brunet, ses oncles, de Guy Denis, leur beau-frère et de Jacques Froger, l’oncle de Michel.

L’automne suivant, Etienne, le père de Michel décède, le 7 novembre 1779.
Michel et Jeanne sont maintenant les nouveaux métayers de la Girouardière. La métairie est devenue, à part entière, le lieu de vie de la famille Chabosseau.
De leur union vont naître dix enfants, les six premiers à la Girouardière, les quatre derniers à la Gourdinière ou ils s’installent en 1795.
Mais ceci est une autre histoire…

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