KAFÛ

Kafū Nagai, de son vrai nom, Sōkichi Nagai, est un écrivain et nouvelliste japonais né à Tokyo, le 04 décembre1879, mort à Ichikawa, le 30 avril1959. Il est reconnu pour ses œuvres décrivant le Tōkyō du XXe siècle, et particulièrement le monde de la prostitution et des geishas.

Biographie

Kafū, né à Tokyo, au numéro 45 de la Kanetomi-chō, dans l’arrondissement de Koishikawa, est le fils de Kyūichirō Nagai, bureaucrate et homme d’affaires qui devint célèbre plus tard pour ses poèmes en style chinois. Kafū est l’aîné de trois frères et sœurs. Lors de la naissance de son frère en 1883, il est envoyé dans la famille de sa mère puis rentre chez lui en 1886 lors de son entrée à l’école secondaire.
En 1891, il intègre une école privée de langue anglaise à Tōkyō. Toutefois, il passera de nombreux mois entre 1894 et 1895 à l’hôpital d’Odawara, sans doute atteint de la tuberculose.
À l’âge de dix-sept ans (1896), bien qu’échouant aux examens d’entrée à l’université, il est diplômé de son école. Cette même année, il commence l’étude des poèmes chinois et entame une longue série de visites dans le quartier chaud de Yoshiwara (à Tōkyō).
Plus tard, il rend visite à son père à Shanghai qui y est employé par la compagnie Nippon Yusen. Il rentre à l’automne et devient employé dans le département de langue chinoise d’une université de langues étrangères. En 1898, Kafū commence à écrire de courtes nouvelles. Dans le même temps, il étudie avec Ryūrō Hirotsu. Deux ans plus tard, il publie quelques nouvelles après avoir quitté son poste à l’université. Il trouve par la suite un poste de journaliste et commence l’étude du français.
En 1902, il séjourne aux États-Unis et en France où il travaille pour le compte de l’ambassade du Japon et du muséum culturel de la préfecture de Kanagawa. Cela lui permet de publier Amerika monogatari (« contes américains ») et Furansu monogatari (« contes français »).

Du côté des saules et des fleurs

« Les saules et les fleurs », comprendre les hommes et les femmes, c’est ainsi que l’on nommait les quartiers geishas, à Tôkyô au début du siècle. Roman d’amour et de jalousies compliquées autour de la belle Komayo, au parfum nostalgique, dans l’intimité des maisons de plaisir. Kafû y décrit les intrigues, les jeux érotiques, les manoeuvres d’amour et d’argent entre amants et geishas : autour de la belle Komayo, acteurs, musiciens, parasites ou amoureux veules se croisent et se déchirent.
C’est aussi l’évocation du Japon ancien que Kafû dépeint avec la cruauté et la tendresse d’un amoureux de ce monde qu’il voyait disparaître avec amertume.

Interminablement la pluie

Interminablement la pluie par Nagai

« Interminablement la pluie est sans conteste l’un des chefs-d’oeuvre, non seulement de l’oeuvre de Kafû, mais de la littérature japonaise de l’entre-deux-guerre » écrivait Pierre Faure.
Par petites touches de confidences esquissées en dissertations sur les plaisirs de la vie, dans un lyrisme contenu, Kafû verse au coeur du lecteur un univers fait de poésie et d’élégance classique, d’érudition et de rêveries inépuisables.
Attentif à mille détails, à d’éphémères intimités, au timbre d’une voix, à des jeux de lumière au détour d’un regard ou d’un souvenir, il décrit avec amour et nostalgie ce Japon ancien, ce monde fugitif du plaisir que Pierre Faure, son interprète idéal, nous fait partager.

Voitures de nuit

Chantre du quartier des plaisirs, Nagaï Kafû (1879-1959) est l’un des écrivains japonais les plus anticonventionnels de sa génération. Ayant appris en France, au début du siècle, le goût des libertés, il refusera son concours à l’association des écrivains japonais d’orientation fasciste, émettant le voeu d’être enterré au cimetière des prostituées et ne cessant jusqu’à sa mort (viveur impénitent) de fréquenter les petites danseuses d’Asajusa qu’il a su dépeindre dans ses romans et ses nouvelles bien dignes des estampes d’Hiroshige et Kunisada qu’il admirait tant.

Critique par Youness Bousenna Publié le 25/03/2020 dans Télérama

De son style moelleux, Nagaï Kafû nous promène de séductions en amourettes, où sourd sa nostalgie d’un Japon traditionnel en déclin.
Il ne faut pas trop se laisser bercer par le style badin de Nagaï Kafû (1879-1959). Le nouvelliste, figure importante des lettres japonaises du début du XXe siècle, ne raconte aucune histoire extraordinaire : seulement le marivaudage entre la bonne société de Tokyo et les geishas de son quartier chaud. Avec son style moelleux et un érotisme contenu, l’air de ne rien dire de plus que la simplicité d’une scène, Kafû nous promène de séductions en amourettes, de petites histoires du quotidien en destins sans relief. Pourtant, la pudeur de sa plume ne doit pas dérober les vérités que ce moraliste nous (dé)voile.
Car les six nouvelles de Voitures de nuit, parues autour de 1930, révèlent par petites touches la réalité souterraine des rapports entre hommes et femmes. Kafû met en scène des personnages presque toujours similaires : des geishas libres d’esprit, émancipées des pesanteurs sociales, et des notables bien sous tous rapports. Mais la fréquentation de ces femmes insaisissables fait dérailler la vie si convenable de ces derniers, excitant leurs pulsions jusqu’à parfois transformer en crime leur obsession de posséder – ainsi, dans la nouvelle L’Hortensia, Kimika finit poignardée par un amant jaloux. Kafû se fait aussi le critique discret de son Tokyo natal, qu’il voit changer. La métropole est devenue la capitale d’un Japon qui s’occidentalise à grande vitesse. Le séisme et le gigantesque incendie qui ont ravagé la ville en 1923 forment un motif présent au second plan de chaque nouvelle. Et à travers lequel Kafû signifie, sans la souligner, sa nostalgie d’un Japon traditionnel enseveli par la modernité.

Trois-raisons-de-relire-Kafu-Article-Telerama-04-2020

1 réflexion sur “KAFÛ”

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