Prédictions pour l’année 2024

Oyé, Oyé, braves gens
Un nouveau gouvernement est né
Gageons, à l’instant
Qu’il sera tout aussi empêtré
Dans d’étranges affaires
Que les précédents

Soyons en assuré
Il prépare cette année
Comme toutes celles qui ont précédé
De nouvelles taxes sur les oies
Les cochons et autres couvées
De toutes nouvelles lois
Pour que les aveugles revoient
Que les sourds entendent de nouveau
Et que les muets s’écrient bien haut :
Bonne année

Avouons-le : le monde est fou

Malgré la persistance de l’aveu
Le monde continu, comme si,
Rien n’avait changé.

Nous ne prenons pas assez soin :
de nous,
des paysages de notre enfance,
des bourdons,
des abeilles productrices.

Je vous implore, humblement
de prendre le virage,
sans trop accélérer,
voire, de rétrograder.

A vous,
Je l’avoue
L’inquiétude pointe son nez
Mais je sais,
que je peux compter sur vous
Pour savourer
A nouveau.

Ouverture de l’entaille

Je n’ai pas su voir l’entaille,
provoquée par l’ancienne collision,
que j’avais oubliée.

Je connais pourtant tes cicatrices
par bien des côtés conductrices
et créatrices d’incertitudes.

Le train a poursuivi sa chute
Je ne l’ai pas vu venir
Seules les odeurs de cendres et de rouille
ont été restituées.

Nous pensions bien faire en fermant l’enclos
Nous nous y pensions à l’abri, à niveau.
Il n’en fut rien
La porte s’est ouverte
sur un avenir incertain.

Courir ta chance

Suppose que le jour devienne la nuit
Et qu’au détour d’un bois
Le clairon se déclenche

Suppose que l’ennui
S’empare de toi
Le lendemain d’un dimanche

Je te demande de retrouver l’envie
De nouveau de croire en toi
Et de courir ta chance.

Fais-moi signe

En prémices de l’écriture,
les Egyptiens et les Mésopotamiens
utilisaient le rébus
J’attendrai la pré-Miss à la ré’d’bus
A la raie de bulles
A quelle heure est l’arrêt ?
A l’arrêt de bus
La pré-Miss montrait ses cuisses
Et ses yeux de biche surlignés
Point à la ligne.

En écriture sumérienne encore utilisée
Par les scribes de Babylone
En hiéroglyphes où en alphabets
Arabe, chinois ou romain
Fais-moi signe :
Donne-moi des nouvelles de la pré-Miss,
Au prochain arrêt. 
Elle est tombée, de Charybde en Scylla.

Si la suite en sol
Se conjuguait au présent
Dans un futur lointain
L’écrit serait dépassé
Plus de plume, de parchemin
Plus de crayon, de vélin
Plus de stylo, de papier
Le cunéiforme numérique eu les faveurs
De la pré-Miss, un temps

Temps de chien, temps de gueux
A la queue, leu leu
Le temps s’est obscurci
Pour l’écrit
Par le Cri de Munch,
Les cris s’élèvent
Cri, y es-tu ?

Le dit et le redit
Ont pris la place
Les douleurs se déplacent
La place publique
Est devenue agora
Au fil des arrêts
Jusqu’à la station Javert.

Jean Valjean n’y mendiait plus,
Il regarda passer la pré-Miss
Dans un coup d’œil complice
En un vœu muet,
Il lui demanda de lui faire signe
De lui écrire,
Des lignes de poèmes foutraques
Des envolées fantasques
De tomber le masque
Pour toucher le sensible
Quel que soit le support et l’outil

Deviendra-t-elle utile dans l’urgence ?
Du devoir d’écrire
Des dictées contraignantes
Des emphases délirantes
Des vers, crachats de l’âme
De soi

Galimatias, que tout ça !
Revenir aux rébus
Aux rebuts, aux débuts
Garder le signe en tête,
L’utiliser en en-tête,
En corps de texte
Où en conclusion
En arial, times ou roman,
En vers ou en prose
Ecrire sur soi, sur d’autres
S’écrire à soi ou aux autres

Philomène et Eulalie

Philomène et Eulalie
Sont devenues amies
Un jour de commémoration
Des morts de la Nation.

Auguste et André
Etaient nés, la même année.
Le 4 août 1914
Ils étaient enrôlés
Dans la grande mêlée.

Les deux poilus
Agés de trente ans
Avaient déjà vécus
Une vie de paysans.

Quitter cette vie
Quitter Philomène et Eulalie
Fut un grand déracinement
Un innommable arrachement.

Philomène et Eulalie
Firent l’apprentissage de la solitude
Leurs journées s’emplirent d’inquiétude
Ce fut le premier grand défi
De leurs jeunes vies

Elles apprirent à se débrouiller seule
Labourer, faucher, confectionner les meules
Par tous les temps, aller à pied
Apporter leurs légumes au marché

André, fut le premier à tomber
Depuis le début des combats
Il était à Verdun, assiégé
Début mars 1916, un shrapnel traversa
Son crâne de haut en bas

Auguste, lui, résista plus longtemps
Il prenait des nouvelles, de temps en temps
De Philomène et de la petite Marie-Anne
Qu’ils avaient adoptée de toutes leurs âmes

En avril 1918, ce fut son tour
A Grivesnes, dans la Somme
Une balle le cueillit au détour
Il n’eut plus de visage d’homme

Au pied du monument aux morts
Une fois que les clairons se turent
Le destin changea leurs sorts
Philomène et Eulalie se reconnurent

De veuves, elles devinrent combattantes
D’envies envahissantes, rassurantes, réconfortantes
Elles allaient, vivre à fond la vie, à chaque instant
Laisser sur le bord du chemin, les tourments

Eulalie se souvenait maintenant
De tous ces délicieux moments
Vécus avec Philomène, son amie
Qui était, elle aussi, à son tour, partie.

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